07/9/15

Le nucléaire contemporain :

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Aujourd’hui, il n’y a que peu d’intérêt pour la stratégie nucléaire. Pour la

plus grande partie des policymakers, le seuil nucléaire est absolu – ce qui se

passe au-delà de ce seuil est impensable. Le seuil nucléaire constitue la frontière

entre ce que l’on sait et ce à quoi on ne veut même pas réfléchir. Cependant,

ce seuil est bien réel – il fonctionne comme le couvercle d’une casserole, qui retient

les conflits dans le domaine de la guerre limitée, selon la définition du général

Beaufre.

Cependant, plusieurs facteurs font que les stratégies nucléaires reviennent

dans l’actualité. En France, la dissuasion se discute davantage à cause, entre autres,

de son coût ; le Sénat y a consacré un bon nombre d’auditions. Pour la Russie,

l’arme nucléaire joue un rôle très important et on n’a pas hésité à l’utiliser comme

arme virtuelle dans une stratégie de gesticulation. Nous y reviendrons. L’accord

récent de Genève sur le programme nucléaire de l’Iran, désormais exclusivement

pacifique, n’est guère assez convaincant pour les voisins stratégiques de l’Iran, et

surtout Israël. Le djihadisme – particulièrement la stratégie d’anéantissement du

prétendu État islamique – avec ses objectifs absolus est aussi un facteur potentiel

dans le jeu nucléaire.

Dans cet article, nous nous concentrons sur l’échiquier européen.

Voir la suite dans Revue Défense Nationale été 2015

 

05/29/15

Maîtrise de l’armement et prévention du conflit. L’expérience de la CSCE/OSCE

Introduction

Les négociations et les accords dans le domaine de la maîtrise de l’armement au début des années 1990 ont joué un rôle très important pour la stabilisation de l’Europe « d’après-guerre froide ». Dans cet article nous allons discuter les plus importantes de ces mesures, leurs caractéristiques et, enfin, voir s’il y a des expériences qui pourraient nous être utile dans la situation contemporaine avec une Russie de plus en plus menaçante.

Ici, nous allons interpréter le terme « maîtrise de l’armement » dans un sens large selon le document de Budapest de 1994, article 11, où l’on parle « d’un programme de mesures nouvelles concernant la maîtrise des armements, y compris en particulier les mesures de confiance et de sécurité. » Nous allons donc traiter la partie la plus importante des documents négociés au sein de la CSCE (OSCE depuis 1994) ; principalement :

  1. La Charte de Paris pour une nouvelle Europe.
  2. La Charte de Sécurité Européenne.
  3. Les Documents de Vienne.
  4. Le Code de Conduite relatif aux aspects politico-militaires de la sécurité.
  5. Le traité sur les forces conventionnelles en Europe (FCE).
  6. Le traité Ciel Ouvert.

 

Légalement, les quatre premiers documents sont l’apanage de la CSCE/OSCE quand les deux traités appartenaient aux organisations particulières entre les membres de l’OTAN et le Pacte de Varsovie (PV)[1].

Dans la pratique et vu comme un système, tous les accords sont cependant liés entre eux. Dans une large mesure, il y avait aussi les mêmes hommes et femmes qui furent aux tables de négociations.

Cet article se base sur les expériences de l’auteur, officier suédois, qui participa à ces négociations entre 1990 et 1998[2].

[1] Le traité Ciel Ouvert s’est ouvert aux autres pays après sa ratification initiale.

[2] Officier traitant à l’EMA suédoise 1990-93, conseiller au sein de la délégation suédoise auprès la CSCE/OSCE 1993-95 et conseiller militaire au sein du ministère des affaires étrangères 1995-98.

Voir la suite dans Stratégique No 108!

05/13/15

La guerre dans les mers fermées au XXIe siècle

Une des spécificités des mers fermées ou des mers étroites est que la proximité de la terre y a une grande influence sur les opérations navales. Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il est aujourd’hui accéléré par deux facteurs. Le premier est le rétrécissement du monde : « L’arène physique est bien demeurée la même en grandeur absolue, si on la considère en dimensions linéaires, en kilomètres. Mais si on l’envisage en temps, c’est-à-dire en durée de parcours, on trouve qu’elle s’est singulièrement rapetissée », écrivait l’amiral Castex dans ses Théories stratégiques. Il est évident que ce rétrécissement est d’autant plus sensible qu’on est déjà dans un espace exigu. Le deuxième facteur est ce que j’appelle l’infrastructuration de la mer. L’un et l’autre facteur concourent à remettre en cause le principe de liberté des mers et posent des problèmes spécifiques en termes de conduite des opérations dans les mers étroites. Les évolutions des systèmes d’armes et de leurs concepts d’emploi conditionnent eux aussi la confrontation de la terre et de la mer. Après avoir étudié ces différents points, nous procéderons à l’étude d’un cas concret.

La remise en cause de la liberté des mers

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05/13/15

Sea Power and Air Power. Some thoughts about the future

Naval power and air power have some similar aspects but they also have some important differences. Both kinds of power are pursued in an environment where man needs technical equipment to survive, move and work. Governments are situated on land where its citizens live most of their lives even if many of them, more or less frequently, take to the sea or travel by air. Indeed, as the French strategist Admiral Castex (1878–1968) put it: “Sea power is mainly interesting according to the extent it contributes to victory on land; it does not secure victory by its own except in exceptional cases” (Castex 1997, vol I:81). The same could be said about air power.

Another resemblance is that, according to classic theory, control of the domain – sea or air, respectively – has to be secured as a precondition to other operations in or from this domain. A third resemblance is the absence of natural frontiers.

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05/13/15

Promemoria till Republikens president

Inledning

(publicerad KKrVA blogg 11 maj)

Under de senaste åren har det blivit allt tydligare att en så kallad fredlig samlevnad inte är möjlig med Västmakterna, dominerade av det aggressiva USA, utan att ge avkall på vår ambition att återupprätta Rysslands storhet.

Samtidigt har befrielsen av östra Ukraina visat på splittring hos Västmakterna. Gamla slagord som ”det finns ingen militär lösning” återupprepas av dagens politiker och har ett betydande gensvar hos delar av befolkningen – som vanligt främst hos de så kallade intellektuella – men också i de ultranationalistiska partier som växer sig starka framför allt i Frankrike och Grekland. Här har vår propaganda betydande möjligheter att bidra till vår strategiska handlingsfrihet.

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04/3/15

La mer – une chance et un défi pour la France

Qu’est-ce que la France pour un Suédois comme moi ? C’est le pays du vin, des champs de blé féconds et les 346 fromages du général de Gaulle ! Mais est-elle vraiment un pays maritime ?

En effet, oui. Mais beaucoup de monde, Français inclus, l’ignorent. La mer est à la foi un défi et une chance pour la France. La France de la mer n’est pas seulement formée de ses trois façades maritimes tournées vers la Méditerranée, l’Atlantique et la Manche mais elle est aussi la deuxième plus grande zone économique exclusive du monde (ZEE), dans laquelle la France a un monopole des ressources maritimes : pêche, minéraux, gaz et pétrole.

Lire la suite à http://www.strato-analyse.org/fr/spip.php?article277&lang=fr

12/26/14

LA SUÈDE ET L’UNION EUROPÉENNE : UN MARIAGE DE COMPLAISANCE

C’est en tant que stagiaire suédois à l’École supérieure de guerre navale 1985-86 (77e promotion) que j’appris avec stupeur que je n’étais pas européen. Jusqu’à ce moment-là, j’avais toujours cru que l’Europe était un continent. Mais non, nos conférenciers nous l’expliquaient, c’était une entité politique où la France – avec le concours de l’Allemagne – jouait le rôle primordial. Avec en son centre la Méditerranée, les pays nordiques ne figurant même pas sur les cartes françaises.

Je crois que ma réaction fut assez typique pour ma génération en Suède. L’Europe, ou les Communautés européennes, c’était quelque chose de distant, d’inconnu, marqué par des querelles politiques incompréhensibles.

Aujourd’hui, la Suède est bien ancrée dans l’UE – mieux que la France du Front national en tout cas– mais les réticences demeurent. Pour nous Suédois, l’Europe est toujours une entité géographique à ne pas confondre avec l’Union européenne. Comme je vais tenter de m’en expliquer dans cet article traitant du point de vue suédois sur l’UE.

Lire la suite dans le numéro 4 de la Revue Outre-Terre: http://www.cairn.info/revue-outre-terre-2014-4-p-139.htm

11/30/14

Ubåtskränkningar – kalla kriget åter?

Detta är den korrekta versionen av artikeln “Kalla kriget. Är det åter?” publicerad – efter censur – i DSM 6/2014.

Svensk skärgård tycks åter ha hemsökts av ryska ubåtar – har det kalla kriget börjat på nytt? Ja man får lätt det intrycket när man följt presskommentarerna kring Försvarsmaktens operation i Stockholms skärgård i mitten av oktober. Men det hela kräver en något mer ingående analys.

Låt oss från början svara på frågan om det kalla kriget har återkommit. Svaret är nej! Det kalla kriget var en mycket specifik period av ideologisk, politisk och militär konfrontation som i princip delade hela världen i öst respektive väst. Öst stod för marxism, diktatur och ett militäriserat samhälle. Väst stod i princip – undantag fanns – för demokrati, marknadsekonomi och pluralistiska samhällen; de militära rustningarna var mycket stora men dominerade aldrig samhället som de gjorde på andra sidan. Denna bipolära värld försvann i samband med murens fall 1989, antagandet av Parischartern för ett nytt Europa 1990 och Sovjetunionens upplösning 1991.

Kalla krigets bipolära värld var farlig – kärnvapen i tiotusental på båda sidor i hög beredskap – men relativt lättfattlig. Dagens värld är däremot multipolär och karaktäriseras av en lång rad väpnade konflikter. I stället för det kalla krigets blockbildning karaktäriseras dagens situation av en mångfald aktörer, såväl statliga som icke-statliga. Att använda ”kalla kriget” som metafor för dagens värld för tanken fel.

En av dessa konflikter är den mellan Ukraina och Ryssland. Här har Ryssland visat att man återigen är en militär stormakt som kan genomdriva sin politik gentemot ett avrustat och splittrat Europa. Detta är ett möjligt perspektiv på operationen i Stockholms skärgård.

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11/24/14

La surprise stratégique

Voici une nouvelle version!

 

Introduction

Dans la première version sonore du film « Les trois mousquetaires », il y a une scène où un conseiller passe sa tête dans le bureau du Cardinal Richelieu et lui dit : « Votre éminence, savez-vous que la guerre de trente ans vient de commencer ? »[1]

Cela, le Cardinal ne pouvait pas le savoir – ce n’est qu’a posteriori qu’on a su que la guerre, qui avait commencé 1618 à Prague, serait si longue. Il a fallu encore plus de temps pour que les conséquences politiques ne deviennent évidentes. Une citation de Churchill illustre bien le cours des choses : « Ne pensez jamais, jamais, jamais, qu’une guerre peut être facile et sans surprise… »[2]

Il s’agit ici d’une surprise stratégique lente, qui tient aux difficultés qu’il y a à comprendre les conséquences du cours des événements actuels. Imaginez un livre blanc sur la défense de la Suède qui daterait du début des années 1620, à l’époque le pays était l’allié de la France. Les responsables n’auraient évidemment pas pu envisager que le pays, quelques années plus tard, mènerait une guerre longue et couronnée de succès au terme de laquelle il se poserait en grande puissance européenne.

Le cheval de Troie est un autre exemple de surprise stratégique bien planifiée et couronnée de succès, qui, d’un coup, décida de l’issue de la guerre. Un aspect important de cet événement est le fait que les Grecs prirent un risque important pour atteindre l’objectif stratégique. Si les Troyens avaient suivi les mises en gardes du prêtre Laocoon en détruisant le cheval, les forces grecques auraient probablement été massacrées jusqu’au dernier homme.

La crise financière actuelle constitue un troisième exemple. Après coup, il est possible d’identifier les signes d’une crise qui s’approche. Malgré cela, il a fallu beaucoup de temps avant que des mesures palliatives ne se soient prises.

L’avenir reste difficile à prédire ; la liste des événements imprévus dans l’histoire est longue. Citons entre autres l’invasion soviétique de l’Afghanistan, la chute du Shah, la chute du mur, l’invasion irakienne du Koweït, le génocide au Rwanda, la bombe atomique de l’Inde et l’attaque du 11 septembre 2001.[3]

Les surprises, quelles qu’elles soient, sont un élément éternellement récurrent dans le développement politico-stratégique. Le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale souligne également les risques de « surprises et ruptures stratégiques ».[4]

Il conviendrait donc de se pencher sur ce phénomène. La première chose à faire est de le cerner. Comme nous l’avons vu ci-dessus, il y a plusieurs formes de surprise stratégique. La deuxième question concerne la manière dont la surprise est créée et comment la prévenir. La troisième question porte sur les moyens d’atténuer les conséquences de la surprise.

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